La caractérologie de René Le Senne

caractéres 1
Dr Nature Psychologie et symbolisme, Tribune et recherche , , , , , , , , ,

 

Définitions

La caractérologie française est une branche de la psychologie qui a pour objet l’étude du caractère psychologique, développée par le philosophe René Le Senne et poursuivie par Gaston Berger. La psychologie contemporaine préfère au concept de caractère celui de personnalité, même si les deux sont proches.

Elle est issue des recherches hollandaises de Heymans et Wiersma qui, après distribution d’un questionnaire auprès de 4000 médecins néerlandais et allemands (à appliquer aux membres de familles qu’ils connaissent bien), dépouillèrent et analysèrent statistiquement les réponses, qui firent apparaître une courbe à 8 sommets, montrant la présence de 8 espèces caractérologiques stables dans la population échantillon. Afin de définir les composantes stables de ces huit types cliniques, Heymans et Wiersma poussèrent plus loin l’analyse et isolèrent trois propriétés fondamentales et stables : L’émotivité – l’activité – le retentissement. Une enquête biographique portant sur 110 personnes (nationalités, sexes et professions différentes) corrobora les résultats de la première enquête.

Le Senne la définit dans son ouvrage « la destinée personnelle » : « la caractérologie est la grammaire de l’analyse de l’individu, l’individualité, la littérature de cette grammaire ; et dans la mesure où elle informera la destinée suivant sa destination, elle est l’œuvre de la personnalité ».

Paul Grieger propose la définition suivante : « la caractérologie est la connaissance des caractères si l’on entend par ce mot la structure congénitale qui sert de situation intrinsèque au moi ». Ou encore : « l’étude méthodique et systématique de la substructure de l’individualité, c’est à dire du caractère ».

 

René Le Senne définit le caractère comme « l’ensemble des dispositions congénitales qui forme le squelette mental d’un homme ». L’auteur insiste avant tout sur la stabilité qu’il faut reconnaître au caractère et préconise l’emploi des concepts de personnalité ou de moi pour les formes ou aspects que peut prendre le caractère au cours de l’existence, en partie par la maîtrise de l’individu par lui-même. Le Senne en a une conception restreinte : «au cours de cet ouvrage, caractère signifiera l’ensemble des
dispositions congénitales qui forme le squelette mental d’un homme.» « Le caractère est un noyau de dispositions foncières et congénitales qui constitue la structure somato-psychologique d’un individu. »

Pour Ludwig Klages, le caractère, objet de la caractérologie, s’étend à la personnalité entière.

Pour Daniel Lagache, c’est « l’ensemble des dispositions et attitudes qui commandent la manière d’être et de réagir de l’individu dans ses rapports avec le monde extérieur et avec lui-même ».

Roger Mucchielli transpose ces définitions en termes modernes : « une sorte de régulateur de notre conduite en même temps qu’un principe organisateur des significations de notre environnement ».

 

Le caractère peut être analysé selon trois axes fondamentaux :

  • l’émotivité : est cette capacité qu’on a à être ébranlé psychologiquement et/ou physiologiquement par une influence intérieure ou extérieure. C’est la charge nerveuse du sujet. Elle est plus ou moins forte selon que le sujet est plus ou moins émotif. C’est la capacité de réaction émotionnelle à un événement (rire, crainte, rougissement, …). Trait général de notre vie mentale qu’aucun événement subi par nous comme contenu d’une percep­tion ou d’une pensée ne peut se produire sans nous émouvoir à quelque degré c’est‑à‑dire sans provoquer dans notre vie organique et psychologique un ébranlement plus ou moins fort. L’émotivité est ainsi d’essence psycho‑énergétique et généralement les émotifs se distin­gueront des non émotifs par l’intensité de leurs manifestations ou de leurs actions. L’émotivité est censée représenter notre réponse psychique à l’environnement et se manifeste par des signes physiques tels que la rougeur ou la pâleur, les pleurs ou le rire, la colère, etc. Le Senne distingue deux catégories : l’Émotif qui réagit de façon vive aux stimuli/le non Émotif qui montre plus de sang-froid.
  • l’activité : correspond à la réaction face à un obstacle, à la facilité à agir. Il s’agit là de l’activité pure, celle qui n’est pas une simple conséquence de l’émotion ; c’est, par exemple, celle avec laquelle on accomplit les tâches rébarbatives (notes de frais). Des gens émotifs et de grande activité peuvent être des « non-actifs ». L’activité est censée représenter notre capacité et notre volonté d’agir. L’Actif est celui qui est porté vers l’action, se fixe des buts et cherche à les atteindre. Le non Actif est plutôt tourné vers lui-même et renonce facilement à agir lorsqu’il rencontre un obstacle.
  • le retentissement des représentations (primarité, secondarité) : c’est la manière de recevoir les impressions, soit par une réaction immédiate et brève (Primarité), soit par une réaction à retardement et prolongée, durable (Secondarité). Le retentissement, c’est la durée des impressions ressenties. Un primaire se fâchera vite, mais passera l’éponge presque
    aussi vite ; un secondaire peut ne pas réagir sur le moment, mais se venger avec détermination des années plus tard. Le Retentissement définit l’influence en nous de ce que nous percevons. Le Senne distingue deux catégories : le Primaire est celui qui vit dans le présent et « secondaire » celui pour qui le passé et l’avenir sont, à l’inverse, prépondérants.

Ces axes ont été choisis en raison de leur importance dans la constitution du caractère. Nous parlerions aujourd’hui de composantes principales dans le cadre d’une analyse de la variance. En 1959, Gauchet et Lambert reprennent tous les travaux de Heymans et Wiersma à la lumière des nouvelles méthodes statistiques, en particulier de l’analyse factorielle. Les trois propriétés (émotivité – activité – retentissement) ressortent bien comme indépendantes.

 

Les combinaisons extrêmes, c’est-à-dire dans lesquelles les propriétés présentent soit leur minimum soit leur maximum, conduisent directement à une typologie.

Voici les types résultant des combinaisons des propriétés constitutives :

  • EAP : le type émotif-actif-primaire, nommé colérique ou actif exubérant ; exemples célèbres : Victor Hugo, Danton, Murat.
  • EAS : le type émotif-actif-secondaire, nommé passionné ; exemples célèbres : Louis XIV, Condé, Napoléon.
  • EnAP : le type émotif-inactif-primaire, nommé nerveux ; exemples célèbres : Watteau, Byron.
  • EnAS : le type émotif-inactif-secondaire, nommé sentimental ; exemples célèbres : Amiel, Robespierre.
  • nEAP : le type non émotif-actif-primaire, nommé sanguin ou réaliste ; exemples célèbres : Fontenelle, Bacon.
  • nEAS : le type non émotif-actif-secondaire, nommé flegmatique ; exemples célèbres : Bergson, Kant.
  • nEnAP :le type non émotif-non actif-primaire, nommé amorphe ; exemples célèbres : La Fontaine, Louis XV.
  • nEnAS : le type non émotif-non actif-secondaire, nommé apathique ; exemples célèbres : Louis XVI.

 

René Le Senne affinera ces 8 types en ajoutant un 4è facteur (largeur du champ de conscience), ce qui mène à 16 types de caractères.

Malheureusement, cette caractérologie a été plus ou moins abandonnée, faute de recherches en Europe, alors que les études américaines de la personnalité font ressortir 5 facteurs principaux par analyse factorielle (dont certains très proches des facteurs de la caractérologie).

 

Questionnaires

  • Le plus connu est celui de Gaston Berger, qui permet d’évaluer 9 ou 10 facteurs (dont les 4 principaux de René Le Senne) au moyen de 10 questions pour chacun : l’émotivité, l’activité, la primarité / secondarité, la largeur du champ de conscience, la polarité Vénus / Mars, l’avidité, l’intérêt sensoriel, la tendresse, la passion intellectuelle.
  • Un autre questionnaire de 40 questions, donc plus rapide, le TC40 pour Test Caractérologique 40, mis au point par Maurice Gex et repris par le Dr Yves Réquéna, acupuncteur et professeur de Qi Gong, cherche à évaluer les types dominants parmi les 8 caractères de base, au moyen de 5 questions pour chaque caractère.

 

Applications possibles

  • Connaissance de soi et des autres
  • Pédagogie
  • Orientation professionnelle
  • Médecine naturelle : identification du terrain, grâce aux travaux du Dr Yves Réquéna, acupuncteur et spécialiste de médecine chinoise.

 

Références

fr.wikipedia.org, universalis.fr, caracterologie.org, agora.qc.ca, libresavoir.org

 

Ressources

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *